La RDC cherche un partenariat stratégique avec les États-Unis pour sécuriser les minerais critiques et la stabilité régionale

Ange Eric Hatangimana

Rémy RUGIRA

Article de The rwandan

La République Démocratique du Congo (RDC) cherche à établir un partenariat stratégique économique et militaire avec les États-Unis, visant à contrer l’influence chinoise, stabiliser ses régions de l’Est en proie aux conflits et sécuriser un accord à long terme sur les chaînes d’approvisionnement en minerais critiques.

Une lettre officielle datée du 21 février 2025, adressée au membre du Congrès américain Rob Wittman, président du Critical Minerals Policy Working Group, expose la vision de Kinshasa pour renforcer ses liens avec Washington. Cette lettre, co-signée par le sénateur Pierre Kanda Kalambayi, président de la Commission de la Défense, de la Sécurité et de la Protection des Frontières, et par le Dr Aaron Poynton, président du Africa-USA Business Council, met en avant les ressources minérales inexplorées de la RDC, estimées à plus de 24 000 milliards de dollars, comme un atout stratégique pour l’industrie et la défense américaine.

Le président de la République démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi

La lettre souligne l’importance de la RDC dans l’approvisionnement en cobalt, lithium, tantale, cuivre et uranium, des matériaux essentiels aux technologies avancées, à l’aérospatiale et à l’industrie militaire. Le président Félix Tshisekedi a explicitement invité les États-Unis à investir dans le secteur minier congolais, marquant une rupture avec la domination chinoise dans l’exploitation et le commerce des ressources naturelles du pays.

Kinshasa propose un partenariat économique et sécuritaire avec les États-Unis, comprenant l’attribution aux entreprises américaines de droits exclusifs d’extraction et d’exportation de minerais stratégiques pour garantir un approvisionnement stable aux industries technologiques et de défense américaines, la création d’un stock stratégique de minerais en collaboration avec les États-Unis pour renforcer la résilience économique et sécuritaire du pays, et l’octroi du contrôle des opérations du port en eaux profondes de Banana aux entreprises américaines, leur permettant de superviser une plaque tournante essentielle des exportations africaines de minerais.

Au-delà des échanges commerciaux, Kinshasa pousse pour un accord de coopération militaire comprenant la formation et l’équipement de l’armée congolaise (FARDC) par les forces américaines, afin d’assurer la sécurité des routes d’approvisionnement et de lutter contre les groupes armés soutenus par des puissances étrangères, la mise à disposition de bases militaires stratégiques pour les forces américaines, leur offrant un accès direct aux zones minières sous menace, et le remplacement des missions inefficaces de maintien de la paix de l’ONU par une collaboration directe entre les États-Unis et la RDC, renforçant ainsi l’influence de Washington sur les questions de sécurité en Afrique.

Depuis des années, la Chine domine le secteur minier de la RDC grâce à des accords de long terme qui lui confèrent un quasi-monopole sur le cobalt et le lithium congolais, des matériaux essentiels à la fabrication des véhicules électriques, des semi-conducteurs et des nouvelles technologies. Cependant, le gouvernement Tshisekedi cherche désormais à diversifier ses partenariats, affirmant que les contrats opaques chinois et le manque d’investissements dans les infrastructures locales n’ont pas profité à la population congolaise.

Tshisekedi et Trump

Les décideurs américains considèrent depuis longtemps la stratégie chinoise de contrôle des ressources africaines comme une menace directe à leurs intérêts économiques et sécuritaires. Le rapprochement de la RDC avec les États-Unis pourrait entraîner un réalignement stratégique global, réduisant la dépendance des chaînes d’approvisionnement américaines à la Chine.

Toutefois, les ambitions de Kinshasa se heurtent à plusieurs obstacles, notamment la guerre en cours à l’Est de la RDC, où les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda ont pris le contrôle d’environ 10 % du territoire congolais. La lettre met en garde contre le fait que si cette instabilité n’est pas contenue, elle pourrait menacer davantage les chaînes d’approvisionnement mondiales en minerais critiques, alors que des groupes armés continuent d’exploiter ces ressources en dehors du contrôle de l’État congolais.

La RDC presse les États-Unis d’agir rapidement et propose l’organisation d’une réunion de haut niveau entre le président Tshisekedi et les principaux responsables américains à Washington. La lettre demande spécifiquement l’implication du président américain Donald Trump, estimant que son engagement direct pourrait garantir le soutien du Congrès pour cet accord historique.

Cette proposition constitue l’une des initiatives diplomatiques les plus significatives de Kinshasa en direction de Washington ces dernières années, alors que la RDC cherche à se positionner comme un acteur clé des chaînes d’approvisionnement mondiales et un allié géopolitique majeur face aux influences étrangères en Afrique.

Si le Congrès américain examine encore la proposition, l’urgence de sécuriser des chaînes d’approvisionnement stratégiques, de garantir l’accès aux ressources critiques et de contrer les puissances concurrentes en Afrique pourrait pousser Washington à approfondir son engagement avec la RDC.

27 février 2025
Washington, D.C.

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